L’Angleterre a-t-elle jamais été joyeuse ? Nous sommes stagnants, divisés, de plus en plus lourdement taxés, et même notre Premier ministre annonce la situatiuon va empirer. À peine deux mois après un mandat où il a promis de ‘marcher plus légèrement‘ sur la vie des Britanniques, Starmer est déjà décrié comme l’ennemi juré de tout plaisir charnel.
Tout d’abord, l’annonce que fumer pourrait être interdit même dehors des pubs. Ensuite, le plan de réduire la consommation de nourriture grasse, avec une consultation en cours sur l’interdiction des restaurants à emporter à proximité des écoles.
Les partisans de telles mesures contestent l’idée que le terme “plaisir” soit approprié pour décrire la dépendance à la nicotine ou les points de vente de malbouffe qui ciblent les enfants. En tant qu’ancien fumeur et adepte d’une alimentation saine, je comprends en partie ce point de vue. Pourtant, cet argument cache un sous-texte plus profond : une vieille querelle, profondément ancrée dans les divisions de classe, sur la signification culturelle et historique du “plaisir”. Ce débat révèle beaucoup sur la vision des nouveaux dirigeants de notre Angleterre, de plus en plus dépourvue de joie.
C’est une ambiguïté profondément enracinée dans l’histoire culturelle anglaise, une dualité qui imprègne particulièrement le Parti travailliste depuis ses origines dans le mouvement syndical du XIXe siècle. Mais à travers ses choix depuis son arrivée à Downing Street, Starmer a révélé que son Labour incarne, presque sans compromis, une seule facette de ce débat : le fabianisme, un Labour non pas des masses industrielles, mais de la bourgeoisie londonienne. Le récent retour de bâton contre ses propositions en matière de santé publique met en lumière que son véritable adversaire n’est peut-être pas “la droite”, mais quelque chose de plus ancien, plus anarchique, et aujourd’hui ironiquement plus proche de la classe ouvrière : l’esprit convivial, chaotique et parfois étonnamment violent de la ‘Merrie England’.
Bien sûr, l’esprit joyeux de l’Angleterre avait déjà été considérablement amoindri lorsque le mouvement bourgeois pour une vie saine et un gouvernement socialiste, connu sous le nom de “fabianisme”, a émergé à la fin de l’ère victorienne, au sein du cercle progressiste de George Bernard Shaw. Aujourd’hui devenu un pilier du Parti travailliste, la Société fabienne, fondée en 1884, reste active et influente. Son projet de taxation progressive, de démocratie sociale dirigée par des administrateurs, et de révolution menée de haut en bas, est visible dans la politique travailliste des dernières décennies.
La tendance fabienne la plus marquante aujourd’hui est sans doute leur sensibilité ascétique. Issus d’un groupe socialiste chrétien appelé la Fraternité de la Nouvelle Vie, leur objectif initial était “la culture d’un caractère parfait en tous” par une vie simple. Parmi les premiers membres se trouvaient des végétariens, des anti-vivisectionnistes, des abstinents, des anarchistes, des pacifistes tolstoïens et d’autres radicaux. Les Fabians se sont séparés de la Fraternité lorsque cette dernière a privilégié les objectifs spirituels plutôt que temporels, optant pour une implication politique plus directe. Rejetant le cadre marxiste de la lutte des classes, ce nouveau groupe cherchait à rendre le socialisme acceptable aux yeux des classes moyennes anglaises.
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