« C’est ma première manifestation », explique un homme affable à personne en particulier. La manifestation anti-immigration se rassemble sur Donegall Place, là où la principale rue commerçante débouche sur la place centrale de Belfast. Face à eux se trouve une rangée de Land Rovers blindés et la police. Derrière eux, le rassemblement Unity Over Division, tous des drapeaux palestiniens. C’est là où Mick Lynch donne un discours. Quand il commence à parler de ‘la classe ouvrière’, tout le monde autour de moi rit.
Les drapeaux sont différents de ce côté de la ligne de police. Un mélange improbable de tricolores irlandais et de drapeaux de l’Union prévaut. À l’avant, des hommes tiennent une grande banderole portant l’inscription « Coolock Says No » (NDT : « Coolock dit non » en français), tandis que d’autres agitent un grand drapeau israélien. Un gars tient une petite croix hâtivement fabriquée en carton. Des jeunes masqués circulent rapidement, mais il y a des gens de tous âges ici, y compris de jeunes enfants. En me frayant un chemin à travers la foule, je passe devant deux femmes et une fille de trois ou quatre ans, toutes habillées de la même manière en rose Barbie : « Mettez-les dehors », chante la fillette avec son doux accent du sud et un joli sourire.
De temps en temps, un projectile est lancé sur la foule Unity Over Division, principalement des ballons d’eau remplis de je-ne-sais-quoi. À deux reprises, des feux d’artifice résonnent au-dessus des bâtiments environnants. « Mettez-les dehors » est le chant favori, bien qu’avec le temps et l’afflux de la foule, les rangs de devant passent à « Oh Tommy Robinson ». De l’autre côté des lignes de police résonne « La racaille nazie hors de nos rues » et un cri solitaire, plutôt guindé, de « Dépravés ! »
Finalement, la manifestation Unity se disperse. Le rassemblement anti-immigration avance, des centaines de personnes se dirigeant vers Donegall Square. Deux hommes se font face devant l’Hôtel de Ville, reculant et avançant sur la pelouse soignée, jusqu’à ce que l’un soit ramené par des amis. La foule descend sur Bradbury Place et se dirige vers le sud. Le but de la manifestation est le Centre islamique sur University Road. Une femme dans la soixantaine demande à quelle distance il se trouve. Dix, peut-être quinze minutes de marche. « Oh merde », dit-elle en levant les yeux au ciel.
La police bloque l’accès au Centre islamique avec une ligne solide de Land Rovers. La foule continue sur une route parallèle. Il s’agit de Botanic Avenue, une rue agréable avec des librairies, des bars, des cafés et des restaurants. La rumeur se répand que le bar à chicha Sahara a été attaqué. Peu de temps après, un groupe de jeunes hommes commence à traîner de grands conteneurs à déchets de restaurant au milieu de la route. La barricade improvisée est une décision née d’un pur instinct, comme des castors construisant un barrage. Il n’y a rien à barricader pour le moment — il n’y a pas de police aux alentours — alors les jeunes hommes haussent les épaules et continuent leur chemin.
La foule fait une pause de 10 minutes. Sans le Centre islamique, il n’y a pas de but. « C’est le chemin de la mosquée ? » demande plaintivement un homme. Puis quelqu’un se dirige vers la porte de l’hôtel Duke et lui donne un coup de pied. Un nouveau plan devient apparent. Les hôtels soupçonnés d’héberger des immigrants feront l’affaire. Peu de temps après, un jeune homme utilise une table de café pour essayer d’enfoncer la porte d’entrée d’un hôtel Ibis sur University Street. Les portes en verre tiennent bon. Un vétéran de la foule lui conseille : « Mets ta capuche. »
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