La marque de lingerie Bluebella vient de lancer une nouvelle version de sa campagne publicitaire #StrongIsBeautiful, mettant en vedette des joueuses de rugby à sept de l’équipe britannique, Jasmine Joyce, Celia Quansah et Ellie Boatman, vêtues de soutiens-gorge transparents et de porte-jarretelles. Il s’avère que, même si vous êtes une joueuse de rugby internationale féminine, il est important de paraître jolie sur le terrain.
La campagne est censée encourager les jeunes filles à ne pas abandonner le sport. Il s’agit d’un problème réel et préoccupant : seulement 10 % des filles de 14 ans effectuent les 60 minutes d’activité physique par jour recommandées par le Médecin en Chef, et près de la moitié des filles qui se considéraient comme ‘sportives’ abandonnent le sport après l’école primaire.
Cependant, il est difficile de voir comment présenter des athlètes puissantes et capables en sous-vêtements — plutôt que de célébrer leurs compétences, leurs tactiques et leur travail d’équipe dans le sport pour lequel elles sont réellement connues — répond à la baisse de participation sportive des filles au début de la puberté. Les études montrent que les principales raisons qui empêchent les filles de faire du sport sont la peur d’être jugées par les autres (68 %), le manque de confiance en soi (61 %), la conscience de soi face aux regards des autres (73 %), et d’autres préoccupations liées aux vêtements et à l’image corporelle (70 %). Comment alors une séance photo de lingerie — qui entraînera inévitablement des jugements d’autrui et presque certainement des commentaires désagréables — est censée persuader les jeunes filles de mener une vie plus active ?
Certains pourraient soutenir que nous devrions célébrer une marque de mode utilisant des mannequins plus athlétiques ou musclées comme moyen de présenter différents types de corps et de promouvoir l’idée de ‘body positivity’. Le problème avec cette logique — et la logique du mouvement en général — est qu’elle confirme simplement l’idée que notre valeur et notre estime de soi devraient dépendre de notre apparence. Ce qui est important ici, c’est que ces femmes se considèrent belles, au détriment de leur force physique, leur résilience ou leurs compétences.
Voici le paradoxe ultime du mouvement de ‘body positivity’ : il donne aux femmes et aux jeunes filles la liberté d’aimer leur corps, mais ne les aide pas à penser à lui librement. Leur dire de célébrer leur apparence ne facilite pas la tâche, et qu’elles se flagellent ou exhibent leurs insécurités, elles restent concentrées de manière excessive sur leur apparence. Au lieu de cela, pourquoi n’y a-t-il pas plus de campagnes publicitaires prônant la neutralité corporelle ? Ne devrions-nous pas dire aux jeunes filles que personne ne se soucie si elles transpirent, que les vêtements de sport devraient être purement fonctionnels, qu’elles n’ont rien d’autre à prouver, qu’il y a des choses bien plus importantes que leur apparence ?
En fin de compte, Bluebella veut simplement vendre des soutiens-gorge : prétendre qu’il s’agit d’une sorte de campagne culturelle pour l’égalité des sexes est malhonnête. Il y a eu un tel progrès ces dernières années dans la visibilité du sport féminin — en 2018, seulement 4 % de la couverture médiatique du sport était consacrée au sport féminin, contre 15 % en 2022. Cependant, des centaines de milliers de jeunes filles passent toujours à côté des récompenses physiques, mentales et sociales d’un mode de vie actif. Mettre leurs modèles potentiels en culottes en dentelle ne changera pas cela.
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