Le président Joe Biden a approuvé l’utilisation par l’Ukraine d’armes américaines à longue portée pour des frappes contre des cibles militaires en Russie. Cela peut sembler contradictoire, mais cette décision aide en réalité son successeur Donald Trump dans son effort imminent de négocier une fin à la guerre en Ukraine.
Les actions de Biden signifieront que l’Ukraine peut utiliser le système de missiles ATACMS pour atteindre des cibles jusqu’à 190 miles à l’intérieur de la Russie. Le Royaume-Uni et la France, qui ont poussé le président américain à prendre cette décision depuis plus d’un an maintenant, sont très susceptibles d’approuver que l’Ukraine soit approvisionné avec leurs propres missiles Storm Shadow/SCALP contre des cibles russes. Ils étaient hésitants à le faire sans l’approbation préalable des États-Unis, car cela risque de permettre à Vladimir Poutine de fragmenter la posture de dissuasion de l’OTAN. Mais que signifie ce développement pour l’avenir de la guerre ?
Au niveau tactique, le principal avantage pour l’Ukraine est qu’elle peut désormais endommager beaucoup plus de cibles clés en Russie. De plus, la simple menace de ces armes obligera les unités militaires russes et nord-coréennes de toutes sortes à prendre des précautions bien plus grandes pour dissimuler leur localisation.
Au niveau de la stratégie militaire, cependant, l’avantage pour l’Ukraine est relativement limité, car ces armes ne peuvent pas compenser l’approvisionnement beaucoup plus important de troupes et de munitions de la Russie. Néanmoins, les armes offrent à l’administration Trump entrante un nouveau levier pour faire pression sur la Russie afin qu’elle accepte un accord de paix compatible avec la souveraineté à long terme de l’Ukraine. Lorsqu’il prendra ses fonctions en janvier, Trump pourra maintenant dire à Poutine qu’il continuera à envoyer des missiles en Ukraine jusqu’à ce que la Russie fasse des concessions. Le président élu a déjà indiqué qu’il est conscient de la nécessité d’imposer cette pression au Kremlin. Mais en prenant cette décision maintenant, Biden offre à Trump un levier tout en s’assurant que la colère de Poutine se dirige vers sa présidence sortante plutôt que vers celle qui est sur le point de la remplacer.
Les critiques de cette décision avertiront qu’elle augmente le risque d’une confrontation directe entre les États-Unis ou l’OTAN et la Russie. Pourtant, ce n’est pas l’OTAN qui a intensifié ce conflit. La Russie a fait cela avec ses attaques délibérées contre des immeubles d’appartements et des hôpitaux pédiatriques, son engagement de la Corée du Nord dans le conflit, et sa campagne plus large de sabotage, d’incendie criminel et de complots d’actes de guerre contre l’Occident.
Ces critiques ont également oublié une leçon clé de la guerre froide. À savoir que, bien que le respect des préoccupations d’escalade soit toujours important, cela doit être mesuré par rapport aux réalités stratégiques plutôt qu’au discours du Kremlin seul. Les menaces nucléaires de Poutine mises à part, la Russie ne va pas commencer un conflit avec l’OTAN à cause de cette décision pour la même raison qu’elle n’a pas commencé de conflit avec l’OTAN pendant la guerre froide. La décision de Biden ne menace pas l’existence souveraine de la Russie ni le pouvoir de Poutine, et le président russe sait qu’il perdrait gravement à la fois une guerre conventionnelle et une guerre nucléaire avec l’OTAN. Restreindre l’aide à l’Ukraine simplement à cause de la rhétorique de Poutine permettrait à la Russie d’obtenir des concessions significatives des États-Unis ; dans un tel scénario, l’Amérique n’aurait pratiquement aucun levier.
Une paix viable entre l’Ukraine et la Russie est possible, mais seulement si elle inclut des garde-fous pour la souveraineté ukrainienne et des mécanismes pour empêcher Moscou d’utiliser simplement un accord pour reconstituer ses forces en vue d’une future attaque. À cet égard, Trump devrait remercier Biden pour ce qu’il a fait ici. En jouant les faucons, le président a donné à son successeur une chance d’offrir à Poutine un choix : la Russie veut-elle faire face à un bon flic, ou à un autre mauvais flic ?
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