Les livraisons de gaz russe via l’Ukraine ont finalement cessé au 1er janvier, environ 1 042 jours après que Vladimir Poutine a lancé son invasion à grande échelle. La fin des livraisons de gaz par le pipeline Urengoy–Pomary–Uzhhorod est survenue après que le président ukrainien Volodymyr Zelensky a refusé d’envisager toute extension possible, y compris un échange de gaz très médiatisé entre la Russie et l’Azerbaïdjan.
Ce qui est le plus remarquable dans cette décision, c’est à quel point elle a peu impacté les prix du gaz en Europe. Cela fait, bien sûr, moins de deux ans que l’Europe a souffert d’une crise énergétique déclenchée par l’effondrement des livraisons de gaz russe, le principal moteur de l’inflation qui a suivi. À l’époque, Poutine a utilisé l’arme énergétique contre l’Union européenne en coupant les approvisionnements en gaz via Nord Stream — avant sa destruction — et en forçant l’arrêt des livraisons par l’autre grand pipeline de l’Ukraine. Mais l’impact sur les prix du gaz de la dernière annulation a été relativement atténué.
Cette interruption marque une perte majeure pour la Russie, avec son géant du gaz Gazprom prêt à perdre environ 5 milliards de dollars par an, soit près de 5 % de ses revenus fédéraux de 2024 provenant des ventes de pétrole et de gaz. Pourtant, il y a aussi des perdants significatifs ailleurs en Europe. La Hongrie et la Slovaquie, en particulier, risquent de perdre des approvisionnements substantiels des 15 milliards de mètres cubes (bcm) de gaz qui s’écoulaient chaque année en Ukraine au cours des deux dernières années. Que les gouvernements de ces pays soient ceux qui ont le plus soutenu la position du Kremlin sur le différend énergétique — et appelé Kyiv à accepter les conditions russes pour commencer des pourparlers de paix — n’est donc pas une surprise.
La Hongrie a déjà fait un ajustement en déplaçant la majorité de ses importations de gaz russe via le seul itinéraire de pipeline restant en livrant du gaz russe en Europe : les pipelines sous-marins BlueStream et TurkStream vers la Turquie et de là via le pipeline BalkanStream à travers la Bulgarie et la Serbie. Mais la capacité pour des livraisons supplémentaires est strictement limitée, et la capacité de BalkanStream n’est que la moitié de celle du pipeline Urengoy–Pomary–Uzhhorod.
L’autre grand perdant est l’Autriche, bien que l’establishment politique soit plutôt heureux que le gaz s’arrête. Il a essayé d’exclure le Parti de la liberté (FPÖ) amical envers la Russie et la position du pays en tant que centre de nombreux réseaux de gaz européens lui a donné la confiance nécessaire pour gérer cette perte.
En plus de la route Turquie-Balkans, cependant, les approvisionnements en gaz russe vers l’Europe continuent par une autre voie : les livraisons de gaz naturel liquéfié (GNL). Contrairement à l’effondrement des exportations de gaz russe par pipeline, ces approvisionnements ont augmenté notablement depuis la guerre en Ukraine. Déjà en 2023, ils représentaient 6% des importations de gaz européennes, soit une fois et demie la quantité fournie par le pipeline Urengoy–Pomary–Uzhhorod.
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