Dans ce qui pourrait constituer un précédent mondial, le Parlement australien a récemment infligé un coup fatal à une législation contre la désinformation, une initiative qui menaçait de remodeler fondamentalement le paysage de la liberté d’expression dans le pays. Ce projet de loi, qui aurait instauré un système à deux vitesses en matière de droits d’expression, a été rejeté de manière décisive — et l’histoire de sa défaite révèle bien des aspects des dynamiques évolutives du discours politique dans le monde post-pandémique.
Initialement porté par le précédent gouvernement conservateur et soutenu par le Parti travailliste de centre-gauche, le texte promettait d’être un tournant dans la régulation des médias australiens. Il proposait des contrôles stricts sur le partage de l’information, avec une particularité intéressante : certains acteurs, tels que les médias traditionnels et les universitaires, auraient été exemptés des dispositions les plus restrictives, tandis que le grand public serait soumis à un examen minutieux et à une censure potentielle.
Ce qui rend cette défaite véritablement remarquable, c’est la large coalition qui s’est formée pour bloquer le projet de loi. Au Sénat, une alliance surprenante a émergé : l’opposition conservatrice, les Verts et des sénateurs indépendants de gauche se sont tous unis pour rejeter la législation proposée. Cette convergence politique inhabituelle suggère une prise de conscience croissante des dangers inhérents à une gestion de l’information contrôlée par l’État.
Des médias progressistes comme The Guardian, qui auraient été protégés des dispositions les plus sévères du projet de loi, ont exprimé leur soutien inconditionnel à la législation, rejetant l’opposition comme une « campagne de peur ». Mais les fractures au sein des cercles progressistes ont été l’un des développements les plus fascinants de cette affaire.
La trajectoire du projet de loi révèle un récit plus profond sur la manière dont la culture progressiste contemporaine est devenue, sans le vouloir, un véhicule pour le contrôle de la parole. Bien que je sois convaincu que les acteurs mondiaux majeurs poussant pour un contrôle de la parole soient centrés, la culture de gauche actuelle a offert un excellent cheval de Troie, par le biais de ses préoccupations collectivistes concernant la santé publique, la politique identitaire, le harcèlement en ligne et les enjeux environnementaux. Ces inquiétudes ont été systématiquement exploitées pour promouvoir des stratégies de gestion de l’information de plus en plus restrictives. Malgré notre réputation de vivre parmi des serpents, des araignées et des émeus, les Australiens ont longtemps été un groupe protégé et fragile, reclus dans des banlieues en cul-de-sac, redoutant à la fois le soleil et nos propres ombres. Notre réponse au Covid en est une illustration frappante. Elle témoigne d’un contraste brutal entre l’image que nous avons de nous-mêmes et la dure réalité.
Exploiter la culture progressiste contemporaine pour instaurer des contrôles sur la parole a non seulement permis de désarmer le secteur des ONG de libre expression numérique, mais dans bien des cas, ces mêmes organisations ont fourni des pelotons de mercenaires numériques pour parcourir Internet et éliminer ce qu’elles définissent comme « désinformation ». Ayant passé près de deux décennies à défendre la liberté d’expression numérique, j’ai été témoin de première main de la manière dont le financement gouvernemental et philanthropique a détourné les mouvements organiques de libre expression numérique pour les orienter vers la surveillance de ce qu’ils qualifient de « désinformation ».
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