Un grand homme barbu portant un bandana sort d’une cabane entourée de camions rouillés et de pièces de rechange pour voitures. Il agite la main et montre un grand panneau sur son toit, qui indique : « Zone sans musulmans ». Surplombant les voies ferrées à proximité, il est bien placé pour choquer les banlieusards et les touristes filant vers des destinations plus attrayantes.
Bienvenue à Rutland, une petite ville dans l’une des belles vallées montagneuses du Vermont. Ici, dans le soi-disant « Vieux Vermont », les habitants sont plus pauvres et plus conservateurs que dans la ville libérale et aisée de Burlington. Rutland est un monde totalement différent des terres impeccables du « Nouveau Vermont », avec ses villes universitaires aisées, ses dispensaires de marijuana, ses stations de ski et ses maisons en bord de lac. Ici les habitants du milieu rural ont été laissés pour compte, et leur politique devient de plus en plus radicale d’année en année.
Pendant longtemps, le chouchou du Vermont, le sénateur américain Bernie Sanders, a maintenu la paix entre la classe ouvrière rurale de l’état et les libéraux venus de la côte. Malgré un mouvement « Reprendre le Vermont » dans les années 2000, les politiques populistes de gauche de Sanders ont apaisé les tensions entre les « woodchucks » et les « flatlanders » [NDT les ruraux et la population de souche]. Sanders était et reste une figure contradictoire, ce qui convenait parfaitement à sa circonscription. Il est timidement en faveur du droit aux armes à feu, mais contre les panneaux publicitaires qui les commercialisent ; farouchement libertaire tout en soutenant également les politiques de bien-être de l’État providence ; ouvertement en faveur des droits des LGBT et des vétérans.
Pourtant, le pacte de Sanders entre le Vieux et le Nouveau Vermont devient de plus en plus fragile. L’écart entre les Vermontois les plus pauvres et les nouveaux arrivants fortunés se creuse, alors que l’inflation, la désindustrialisation, les contraintes agricoles et les prix élevés de l’immobilier mettent sous pression les populations rurales. Bien que l’État du Mont Vert soit souvent considéré comme un bastion du libéralisme, il n’est plus à l’abri de la fureur politique empoisonnant le reste de l’Amérique.
Pour avoir une idée de la situation politique délicate du Vermont, je me suis rendu à Burlington : le berceau du Nouveau Vermont. À la fin des années soixante, des réfugiés du mouvement hippie, dont Sanders, se sont installés ici et se sont réinventés en socialistes. Ces exilés hippies, ainsi que l’accroissement de l’éducation universitaire, seraient responsables de la transformation du Vermont, autrefois bastion républicain protestant, en un État démocrate libéral.
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