Lors d’une récente visite dans une usine Michelin en périphérie de Paris, le ministre des Affaires industrielles, Marc Ferracci, a été hué et insulté. Cette usine fait partie des nombreuses fermetures industrielles prévues à travers la France. À cela s’ajoutent les grèves attendues dans le secteur public et les chemins de fer. Il est encore trop tôt pour dire si la République connaîtra une crise sociale prolongée comme par le passé, mais la situation n’est clairement pas favorable.
Malgré ces graves problèmes économiques, la classe politique française semble absorbée par des stratégies et des manœuvres tactiques, toutes centrées sur les conséquences potentielles de l’effondrement du gouvernement Barnier. Il paraît de plus en plus probable que Barnier fasse passer son budget en utilisant l’Article 49:3 de la Constitution, qui permet d’adopter une législation sans vote parlementaire. La Gauche a annoncé qu’elle chercherait à faire tomber le gouvernement, tandis que l’extrême droite, dont le soutien sera crucial, a indiqué qu’elle serait disposée à voter avec la Gauche dans cette optique. Si tel est le cas, le gouvernement Barnier pourrait s’effondrer entre le 15 et le 21 décembre.
Récemment, certains ont évoqué la possibilité d’un mouvement encore plus précoce pour renverser Barnier — peut-être dès la semaine prochaine. L’opinion publique française reste divisée à ce sujet, bien qu’elle semble étonnamment favorable à l’idée d’un effondrement. Un sondage récent a révélé que juste un peu plus de la moitié des personnes interrogées soutiennent la dissolution, malgré les turbulences des élections législatives de cet été. Ce chiffre diminue légèrement lorsque la perspective d’une crise financière est abordée, mais même dans ce cas, un solide 46 % reste favorable à une action contre Barnier.
Lorsque le gouvernement Barnier a été formé, à la fin de l’été, après une longue période d’incertitude fébrile, il semblait signaler un retour du centre-droit des Républicains. Ces derniers s’étaient vu attribuer certains des postes les plus influents, tels que celui du ministre de l’Intérieur, tandis que Barnier lui-même venait de cet aile du spectre politique. La Gauche avait alors crié au scandale, se considérant comme la grande gagnante des élections législatives, tout en voyant le centre-droit revenir au pouvoir.
Cependant, il a toujours été risqué de fonder le renouveau d’un parti et d’une tradition politique sur un édifice aussi fragile que le gouvernement Barnier. Moins de six mois après sa formation, il devient évident que la dynamique fondamentale de fragmentation politique — où aucune force n’est capable de créer une majorité durable — se réaffirme. Le gouvernement Barnier n’est pas un moyen de surmonter cette fragmentation, mais plutôt une distillation de celle-ci.
Cette fragmentation n’est pas apparue soudainement. Elle était déjà évidente au début des années 2000, bien qu’elle ait été masquée par l’effet de rassemblement produit par les résultats étonnamment bons de l’extrême droite française. Le fait que ni la Gauche ni la Droite ne parviennent plus à obtenir les mêmes parts de vote qu’auparavant a été occulté par le pouvoir du cordon sanitaire : des majorités étaient construites sur la peur de laisser l’extrême droite accéder au pouvoir.
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