Lorsque Tooba Gondal, la célèbre ‘marieuse d’Isis’ britannique, a froidement célébré les attentats de Paris de novembre 2015, elle ne pouvait pas savoir que son destin était de revenir dans cette grande ville en tant que résidente de son système pénal. En décembre dernier, Gondal a été condamnée à Paris à 10 ans d’emprisonnement pour des infractions liées au terrorisme d’Isis. ‘Brûlez Paris, brûlez’, avait-elle tweeté à l’époque.
La dernière fois que Gondal, née à Paris mais ayant passé la majeure partie de sa vie en Grande-Bretagne, a fait l’actualité, c’était en octobre 2022, lorsque The Sunday Times a rapporté sur son procès imminent en France. Mais son emprisonnement semble être passé inaperçu tant dans ce pays qu’en France. Je n’en ai découvert l’existence que récemment après avoir googlé distraitement le nom de Gondal — comme on le fait parfois dans mon jeu — et c’était là, dans un rapport de journal plutôt morose et factuel du Musée-mémorial du terrorisme, qui a été créé en 2018 pour honorer la mémoire des victimes du terrorisme en France.
Le rapport enregistre ce qui suit. Le procès de Gondal s’est tenu du 1er au 5 décembre 2023. Le ministère public a demandé une peine de 15 ans d’emprisonnement, soulignant le ‘rôle de Gondal en tant qu’influenceuse au service d’Isis’, ses ‘excuses pour des actes de terrorisme, y compris ceux du 13 novembre 2015 en France, ainsi que le port et la manipulation d’armes de guerre’. La défense de Gondal, dirigée par Marie Dosé, une avocate française éminente qui a représenté plusieurs autres femmes revenant d’Isis, a soutenu que le ministère public manquait de preuves pour ses allégations et a insisté sur le fait que Gondal, depuis la naissance de son premier enfant, avait voulu ‘échapper à l’emprise d’Isis’.
Le dernier jour du procès, le président du tribunal a demandé si Gondal avait quelque chose à dire avant de rendre son verdict. ‘Ce procès compte beaucoup pour moi. Je m’excuse,’ a-t-elle répondu, adoptant un ton de respectueuse humilité. Comme le conclut le rapport de journal : ‘Le tribunal a rendu son verdict à la fin de l’après-midi, 10 ans d’emprisonnement criminel avec une période de sûreté de deux ou trois ans, avec un suivi socio-judiciaire et une obligation de soins.’
L’emprisonnement de Gondal marque la fin d’un voyage fou qui a commencé en janvier 2015. Gondal, alors âgée de 21 ans, a quitté ses études universitaires à Goldsmiths, s’est relocalisée à Raqqa, en Syrie, est devenue recruteuse pour Isis, a eu deux enfants, s’est mariée et veuve trois fois, a été touchée entre les yeux par une balle explosive, a obtenu une interdiction de territoire au Royaume-Uni, a survécu à la défaite d’Isis à Baghuz, s’est rendue aux Forces démocratiques syriennes, a joué dans un documentaire sur sa vie, et a fui la captivité administrée par les Kurdes après que son camp de détention a été bombardé par la Turquie. Elle a finalement été reprise par les forces turques et expulsée vers la France avec ses deux garçons en novembre 2019.
Il y aura beaucoup de personnes pour qui la peine de 10 ans de prison de Gondal sera terriblement insuffisante. Cela est dû à l’ampleur et à la gravité des nombreux crimes de l’Isis, y compris le génocide perpétré contre les Yézidis, et au rôle que les femmes de l’Isis ont joué dans ces crimes. Pourtant, la peine de Gondal n’est guère clémente et dépasse la peine de prison moyenne infligée aux rapatriés français de l’Isis, qui, selon la chercheuse Sofia Koller, est de six ans et huit mois. Elle dépasse également de manière substantielle la peine de prison moyenne pour les rapatriées de l’Isis en Allemagne, qui est de trois ans et 10 mois. Et c’est une peine considérablement plus punitive que celle infligée à la seule autre rapatriée britannique de l’Isis qui a été jugée : Tareena Shakil, qui est maintenant apparemment une influenceuse de mode en herbe, après avoir été emprisonnée pendant six ans en février 2016.
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