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La France va-t-elle destituer Macron ? Les hurlements pour la démission deviennent de plus en plus forts

Le président français Emmanuel Macron assiste à l'inauguration de la nouvelle station de métro Saint-Denis Pleyel et de l'extension de la ligne 14 du métro parisien, à la station de métro 'Mairie de Saint-Ouen', au nord de Paris, le 24 juin 2024. Après des mois de course contre la montre, l'extension de la ligne 14 accueillera ses premiers passagers le 24 juin 2024, reliant Saint-Denis, au nord de Paris, à l'aéroport d'Orly, un mois avant l'ouverture des Jeux Olympiques de Paris 2024. (Photo par Yves Herman / POOL / AFP) (Photo par YVES HERMAN/POOL/AFP via Getty Images)

Le président français Emmanuel Macron assiste à l'inauguration de la nouvelle station de métro Saint-Denis Pleyel et de l'extension de la ligne 14 du métro parisien, à la station de métro 'Mairie de Saint-Ouen', au nord de Paris, le 24 juin 2024. Après des mois de course contre la montre, l'extension de la ligne 14 accueillera ses premiers passagers le 24 juin 2024, reliant Saint-Denis, au nord de Paris, à l'aéroport d'Orly, un mois avant l'ouverture des Jeux Olympiques de Paris 2024. (Photo par Yves Herman / POOL / AFP) (Photo par YVES HERMAN/POOL/AFP via Getty Images)


septembre 5, 2024   5 mins

Après 50 jours sans gouvernement, la France perd la tête. Ce qui a commencé comme une curiosité historique s’est transformé en crise. Non seulement le gouvernement intérimaire actuel est incapable de gérer autre chose que des ‘affaires courantes’, mais la date limite pour adopter un budget approche et les Français se lassent de la saga politique estivale pour choisir un premier ministre. Dans un sondage réalisé à la fin juillet, 67 % des adultes estimaient que la décision d’Emmanuel Macron de dissoudre l’Assemblée nationale et de convoquer des élections anticipées était une erreur. Depuis lors, les attitudes se sont durcies. Les tactiques de retardement de Macron, et son mépris à l’égard de la Gauche en refusant sa nomination de Lucie Castets au poste de premier ministre, ont suscité un appel à sa destitution mené par le parti d’extrême gauche France Insoumise.

Entre-temps, le désenchantement à l’égard de tous les acteurs politiques du pays s’est installé. L’Assemblée nationale française, loin d’être perçue comme un défenseur de la démocratie contre un président autocratique, est vue aussi négativement que la présidence. Il est révélateur que ces derniers jours, Gabriel Attal, l’actuel Premier ministre intérimaire, soit devenu un choix privilégié pour le poste de premier ministre. Il semble que beaucoup en France préfèreraient oublier cet épisode désolant et revenir au statu quo ante.

Mais la stabilité politique est désormais un luxe du passé. La politique française a atteint un tel point mort que même la nomination éventuelle d’un premier ministre ne peut le surmonter. Les appels à l’action abondent mais ont peu de chances réelles de se concrétiser. Prenez l’appel de La France Insoumise à la destitution de Macron. Le mouvement, dirigé par Jean-Luc Mélenchon, a soutenu que les actions de Macron sont profondément antidémocratiques, se positionnant comme des défenseurs de la démocratie française. Leur pétition pour la destitution a recueilli des milliers de signatures, et ils ont appelé à des manifestations de masse qui doivent avoir lieu samedi.

Et pourtant, il est très peu probable que Macron fasse face à une destitution. La motion est principalement un dispositif rhétorique, car il est extrêmement difficile de la faire passer sous les règles de la constitution de la Cinquième République. France Insoumise a atteint le seuil de 10 % de députés ou de sénateurs requis pour que la motion soit considérée comme recevable par le comité législatif compétent. Une tentative de destituer François Hollande en 2016, sur des allégations selon lesquelles il aurait révélé des secrets d’État dans ses discussions avec des journalistes, a atteint ce stade avant d’être rejetée. Si une motion de destitution était considérée comme valide, elle nécessiterait alors une majorité des deux tiers dans les deux chambres législatives — le parlement et le sénat. Il y a peu de soutien pour un tel mouvement en dehors de France Insoumise, ce qui signifie qu’il est presque impossible d’imaginer qu’elle atteigne l’exigence des deux tiers juste à l’Assemblée nationale, sans parler du Sénat où le LFI n’a aucun sénateur.

Face à une telle hostilité, la stratégie de Macron est devenue plus claire. Son veto ferme à la candidate de gauche Lucie Castets a révélé sa détermination à ne pas nommer un premier ministre engagé à annuler ses propres réalisations législatives. Ses réformes des retraites semblent lui tenir particulièrement à cœur.

‘Face à une telle hostilité, la stratégie de Macron est devenue plus claire.’

Un sérieux prétendant au poste de premier ministre est Bernard Cazeneuve, qui était le confident politique de Macron lorsqu’il était une étoile montante dans le gouvernement Hollande et que Cazeneuve était ministre de l’Intérieur. Les deux hommes, qui auraient le même goût pour les films (les classiques de Michel Audiard) et se retrouvaient pour des discussions tardives autour d’un whisky, se sont fâchés après que Macron a lancé En Marche. Ce faisant, Macron s’est insurgé contre le même establishment politique que Cazeneuve incarnait après que Hollande l’ait nommé premier ministre en décembre 2016. Pourtant, malgré sa notoriété, Cazeneuve manque de soutien au sein de l’alliance du Nouveau Front Populaire, notamment de France Insoumise. Et, peut-être de manière fatale, il semble ne pas être en faveur du maintien des réformes des retraites de Macron.

En revanche, Xavier Bertrand, un candidat de centre-droit, serait peu susceptible de mettre en danger le programme de Macron s’il devenait Premier ministre. Bertrand a une relation ambivalente avec le parti de centre-droit, Les Républicains. Sa carrière politique a atteint son apogée sous Nicolas Sarkozy, mais en 2022, il semblait être en bonne position pour remporter la nomination de centre-droit pour l’élection présidentielle. Cependant, lors de la primaire de son parti, Bertrand est arrivé loin derrière d’autres candidats, ce qui l’a poussé à quitter le parti. C’est peut-être le désastre ultérieur du parti lors de l’élection de 2022 — où son candidate, Valérie Pécresse, n’a pas réussi à obtenir plus de 5 % des voix, mettant le parti en difficulté financière sérieuse — qui explique la survie politique de Bertrand. Lorsque le leader du parti de centre-droit, Eric Ciotti, a décidé de nouer une alliance avec l’extrême droite pour les élections législatives de 2024, le mettant en désaccord avec toutes les autres figures de proue de son propre parti, Les Républicains ont été encore plus affaiblis. Pendant ce temps, Bertrand a languis dans le désert politique — une période qui a peut-être entamé ses ambitions présidentielles. Il semble peu probable qu’il conteste les politiques de retraite de Macron.

Le problème de toute nomination est qu’elle nécessite le soutien d’autres partis à l’Assemblée nationale afin de produire un gouvernement stable. C’était la difficulté posée par Lucie Castets : en promettant de réaliser le programme du Nouveau Front Populaire, elle était peu susceptible d’obtenir le soutien de ces partis à droite du NPF, comme le groupe Ensemble de Macron, dont elle aurait besoin pour faire passer toute législation. Cazeneuve, en revanche, est plus enclin à soutenir les députés de Macron mais manque de soutien de l’extrême gauche. Sa nomination ne réussirait qu’en brisant le Nouveau Front Populaire. Bertrand fait face à une difficulté similaire à droite, bien que ses chances semblent plutôt meilleures.

Pour beaucoup, le poste lui-même est une coupe empoisonnée. Ceux appartenant à Les Républicains avec des ambitions présidentielles pour 2027, notamment Laurent Wauquiez, sont méfiants à l’idée de rejoindre le gouvernement. Ils ne souhaitent pas s’attacher à un navire macroniste en train de couler, ce qui aurait un effet délétère sur leurs propres espoirs politiques. Bertrand est inhabituel en ce sens qu’il semble prêt à accepter le poste, mais il est également probable qu’il fasse face à l’opposition de l’extrême droite, qui a déclaré qu’elle présenterait une motion de censure si jamais Bertrand formait un gouvernement. Cependant, il est peu probable qu’une telle motion puisse faire tomber l’administration, nécessitant pour cela une majorité absolue dans la chambre.

En déclarant la victoire le soir du 7 juillet, la gauche française était donc totalement irréaliste. Elle n’avait tout simplement pas assez de sièges à l’Assemblée nationale pour pouvoir former un gouvernement et réaliser son programme. Si cette impasse se poursuit, Macron pourrait bien se tourner vers une figure non politique, quelqu’un capable de diriger un gouvernement technocratique qui pourrait gagner l’approbation des partis à l’Assemblée nationale. Un nom qui a émergé à cet égard est Thierry Beaudet, président du Conseil économique, social et environnemental, un troisième pilier du gouvernement en France qui représente ces intérêts collectifs qui se situent dans l’espace entre les citoyens et l’État, tels que le travail organisé, les propriétaires d’entreprises et les agriculteurs. Ce serait un choix curieux pour Macron étant donné sa dénonciation passée de ces intérêts comme égoïstes et intéressés.

En attendant, plus la crise dure, plus elle affaiblit Jupiter lui-même. Divisé sur tout le reste, le Parlement est peu susceptible de destituer le Président. Mais si l’impasse se prolonge encore longtemps, les hurlements pour la démission de Macron commenceront.


Christopher Bickerton is a Professor in Modern European Politics at the University of Cambridge.

cjbickerton

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Emmanuel MARTIN
Emmanuel MARTIN
2 mois il y a

C’est pas des hurlements, c’est des glapissement. Macron n’est pas très populaire, mais ses alternatives ne le sont pas non plus.
Donc le cirque va se poursuivre. La Belgique a vécu un an sans gouvernement, et ne s’en est pas plus mal portée.