« C’est la peau d’un tueur, Bella. » Le corps inflexible d’Edward est illuminé par le soleil dans une clairière sombre ; mille cœurs préadolescents se mettent à battre. Si beau, si dangereux, si mien. Ces mots immortels du mégalithe vampirique Twilight traîneront une Kristen Stewart qui plisse le nez et hausse les épaules à travers mille épreuves, qui incluent mourir en donnant naissance à un monstre parasite avant d’être réanimée par son fidèle mari.
Le message de Twilight est clair. Au-delà de ce monde ordinaire se trouve un hybride sombre combinant Byron et Darcy avec une pléthore de caractéristiques positives : il est universellement désiré, il ne désire personne d’autre et — oh ! — il pourrait te tuer, mais il ne le fera pas. Depuis 2005, Edward Cullen est un réconfort pour les adolescentes : le bon homme ne te détruira pas ; il choisira plutôt de te sauver de la médiocrité et de te donner tous les attributs — mariage, bébé, vie éternelle ? — du bonheur conventionnel. Pas si effrayant après tout.
Près de 20 ans après la publication du premier roman de Stephenie Meyer, la génération Twilight a grandi. Les petites filles sont devenues des femmes lassées du monde, ballotées par les réalités sombres des applications de rencontres, vieillissant avec un ressentiment que Bella n’aura jamais connu. Au fil des années, leurs désirs ont mûri.
Maintenant, les disciples de Meyer ont développé une soif de matériel plus sombre. Les deux dernières années ont vu une explosion de ‘smut’ fantastique, grâce à la communauté BookTok sur TikTok. Le héros aux biceps saillants de Mills & Boon a été chassé par une horde de nouveaux symboles sexuels improbables, encouragés par des ‘créateurs’ qui disent à leurs légions de spectateurs haletants : ‘Sérieusement, c’est le livre le plus sexy que j’ai jamais lu !’ Le contenu de ces livres ? J’ai presque honte de vous le dire, mais je vais le faire quand même. Commençons par un exemple :
Glory Milking Farm est un ‘roman de monstre doux et torride’ extrêmement populaire de la série érotique Cambric Creek de C.M. Nascosta. Le livre a captivé, en bien ou en mal, sur les réseaux sociaux depuis sa sortie en 2021, et décrit l’histoire d’amour de Violet, une ‘Millenial’ typique, qui se retrouve à travailler dans une ferme pour minotaures séduisants (le prétexte, qui a quelque chose à voir avec la fabrication de médicaments contre la dysfonction érectile pour les hommes humains, n’intéresse personne, surtout pas l’auteure). Un minotaure ‘trop bien pour elle’ — une phrase immortelle en soi — s’intéresse particulièrement à la jeune femme et exige des sessions de ‘traite’ privées. Violet en sera-t-elle capable ?
Je ne sais pas, je ne vais pas le lire. Et je ne vais non plus ajouter de lien Amazon, bande de pervers. Mais soyez assurés que ce n’est qu’un livre parmi des centaines d’œuvres de pornographie mettant en scène des monstres, qui insufflent de la vie dans l’industrie de l’édition. Nous avons aussi la série Ice Planet Barbarians sur des extraterrestres dotés d’appendices semblables à des jouets sexuels ; Ensnared (un porno basé sur les araignées) ; et d’innombrables itérations de The XYZ Bride (orques, dragons, ce que vous voulez). Au cœur de chacun se trouve la prémisse très Twilight du tueur bestial et sexy qui ne veut que vous, mais avec beaucoup plus de scènes de sexe que ce que nous avons eu de la part du clan Cullen.