Bien que les électeurs français aient rejeté le Rassemblement National d’extrême droite le week-end dernier lors des élections, en apportant la majeure partie de leur soutien soit au RN soit à la gauche, ils ont tout de même rejeté l’internationalisme libéral d’Emmanuel Macron. Ce faisant, la France s’est jointe à la vague montante contre la mondialisation néolibérale.
La France est arrivée sur le tard. Jusqu’à il y a environ 15 ans, l’économie mondiale s’était libéralisée de manière constante depuis des décennies, alors qu’un prétendu Consensus de Washington encourageait les pays du monde entier à ouvrir leurs frontières au commerce, à l’investissement et à la migration de la main-d’œuvre. En conséquence, tout au long de l’ère néolibérale, qui a culminé avec le retour de la Chine dans le système commercial mondial après la mort de Mao Zedong, le commerce a augmenté encore plus rapidement que le PIB mondial et a stimulé la croissance économique partout. Pendant ce temps, le vieillissement des pays occidentaux rendait les immigrants de plus en plus vitaux pour les marchés du travail occidentaux.
Tout cela s’est arrêté avec la crise financière de 2008. Alors que les dirigeants des pays occidentaux ont initialement tenté de restaurer la primauté de la mondialisation néolibérale, une révolte populiste croissante contre celle-ci avait commencé. Les deux chocs du référendum sur le Brexit en 2016 et de la victoire de Donald Trump aux élections présidentielles américaines semblaient symboliser le début d’un grand renversement.
Face à cette offensive, Emmanuel Macron a lancé une attaque de la dernière chance lors de l’élection présidentielle française de 2017, battant Marine Le Pen du Front National avec un programme ouvertement libéral et pro-européen. Pourtant, son triomphe se révélerait de courte durée. En plus de l’anxiété croissante concernant l’immigration, le sentiment public continuait de se retourner contre le libéralisme économique, le multilatéralisme, les frontières ouvertes et, en Europe, l’intégration continentale. Aujourd’hui, la France rejoint une liste de plus en plus longue de pays européens où les populistes de droite, certains ayant des racines dans des mouvements de l’ère fasciste, sont au pouvoir ou en progression constante. L’extrême droite est déjà au gouvernement en Italie, aux Pays-Bas, en Finlande, en Croatie, en Hongrie, en Slovaquie et en Tchéquie, tandis qu’elle est encore en progression en France, en Allemagne, en Autriche, en Belgique et au Royaume-Uni, où le parti Reform de Nigel Farage a finalement obtenu une place au parlement à partir de laquelle il vise à prendre le contrôle de la droite britannique.
Ce changement d’humeur s’est étendu bien au-delà de l’Europe. Dans tout l’Occident, la porte ouverte au commerce, à l’investissement et à l’immigration se rétrécit. Alors que l’Amérique n’est pas allée jusqu’à payer des pays voisins pour appréhender les migrants, comme c’est le cas en Europe, l’administration Biden a reconnu à quel point la question de la frontière est devenue un enjeu puissant en cette année électorale volatile, et a considérablement réduit le nombre de personnes autorisées à entrer. Au Canada, traditionnellement un pays accueillant pour les nouveaux arrivants, le gouvernement a été contraint de répondre à une pénurie de logements en plafonnant temporairement l’immigration.
En parallèle, le président Biden a commencé à imposer des tarifs sur les importations de produits chinois et a porté un regard plus méfiant sur les investissements dans les industries qu’il considère comme stratégiques. Des tactiques protectionnistes similaires émergent ailleurs : entre 2018 et 2022, le nombre de mesures restrictives à travers le monde a été multiplié par six. De plus, la réduction des risques et le recentrage sur les amis sont devenus très populaires à la suite de la pandémie de Covid, qui a mis en lumière la fragilité des chaînes d’approvisionnement mondiales. En conséquence, les indicateurs communs de la mondialisation se sont maintenant inversés : après des décennies de croissance plus rapide que l’économie mondiale, le commerce international et l’investissement direct étranger sont tous deux en recul relatif.
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