Pour la première fois en plus d’un millénaire, il n’y a plus d’Arméniens dans le Haut-Karabakh. Ils ont survécu aux invasions mongoles et arabes ainsi qu’à l’âge des empires, lorsque les tsars, les shahs et les sultans se battaient pour ce carrefour stratégique des routes commerciales et des voies militaires entre la mer Noire et la mer Caspienne. Mais ils n’ont pas réussi à trouver leur place dans la brutalité de la géopolitique du XXIe siècle, suite à la blitzkrieg de l’Azerbaïdjan il y a un an.
Les dirigeants arméniens croyaient que leur lien spécial avec la terre avait assuré leur victoire de 1994 dans la première guerre du Haut-Karabakh contre l’Azerbaïdjan. Ils pensaient pouvoir en gagner une autre aussi, en 2020, en poussant pour des revendications maximalistes tout en échouant à obtenir un allié fiable, que ce soit en Russie ou en Occident. Ils ont substitué la diplomatie et la stratégie militaire par des rêves de nationalisme romantique.
Dans les années quatre-vingt, alors que l’empire soviétique entrait dans sa spirale de mort, un mouvement pour les droits des Arméniens majoritaires dans le Haut-Karabakh autonome au sein de l’Azerbaïdjan soviétique prenait de l’ampleur. Le mouvement du Karabakh croyait que les Arméniens ethniques avaient le droit de vivre sur leur terre ancestrale après des années de harcèlement et de discrimination. Mais les Azerbaïdjanais soviétiques le voyaient comme du séparatisme, et une répression s’ensuivit.
Des nationalismes se propageant rapidement ont tourné voisins contre voisins. En Azerbaïdjan, des Arméniens ont été tués dans les rues lors d’une série de pogroms. Des maisons ont été pillées et des victimes ont été violées, assassinées et brûlées vives par des foules. Lorsque l’URSS s’est effondrée, en 1992, les deux nations nouvellement établies ont déclaré la guerre.
Les Arméniens ont prévalu, sécurisant le contrôle de la région et forçant près d’un demi-million d’Azerbaïdjanais à fuir les sept districts occupés adjacents au Haut-Karabakh. C’était le plus grand des plusieurs exodes se produisant dans les deux sens. Et en 1994, après qu’un cessez-le-feu ait été convenu, la petite Arménie, plus pauvre et enclavée, est sortie victorieuse. Même si l’occupation arménienne des sept districts était une violation du droit international, toutes les tentatives de réconciliation ont échoué. Après des années d’inimitié mutuelle, de pogroms et d’atrocités des deux côtés, il n’y avait plus de confiance.
Levon Ter-Petrossian, le premier président de l’Arménie indépendante et leader du mouvement du Karabakh, voulait rendre les territoires occupés. Mais il a été renversé en 1998 par des ministres intransigeants qui ont rejeté le compromis. Des idées nationalistes, mijotant depuis des décennies, ont éclaté au grand jour et les nouveaux dirigeants intransigeants ont formé une alliance avec la Fédération révolutionnaire arménienne, précédemment interdite. Ils ont déclaré que les sept districts autour du Karabakh étaient des terres arméniennes historiques ; elles avaient été libérées, non occupées.
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