« Chacun est conservateur sur ce qu’il comprend le mieux », a suggéré l’historien distingué Robert Conquest dans l’un des aphorismes qui sont devenus connus sous le nom de Les Trois Lois de Conquest sur la politique. Et il avait sûrement raison — j’ai rencontré des théoriciens d’extrême gauche qui s’opposent néanmoins par principe à tout changement des lois du cricket.
Il est donc frappant que le secrétaire à la Santé Wes Streeting et la secrétaire à la Justice Shabana Mahmood se soient publiquement opposés au nouveau projet de loi sur l’aide à mourir du député travailliste Kim Leadbeater — supposément contre l’avis des fonctionnaires du Cabinet Office. Le ministère de la Justice et le département de la Santé et des Soins sociaux sont deux des départements dont le travail et les employés seraient les plus directement affectés par la légalisation du suicide assisté.
Ces deux voix d’opposition reflètent ce qui semble être un scepticisme croissant entre les partis concernant l’idée du suicide assisté. L’hypothèse paresseuse, répétée sans cesse par les partisans, selon laquelle l’opposition est une question de dogme religieux, est désormais intenable. L’universitaire Yuan Yi Zhu, l’un des premiers à mettre en lumière pour les lecteurs britanniques les terribles abus se produisant sous le régime MAiD du Canada, ne semble pas être un religieux croyant. Il en va de même pour la journaliste Sonia Sodha, une critique virulente des propositions. L’indéfectible militante pour les droits des personnes handicapées, Liz Carr, une vétérane campagne contre l’euthanasie, n’est pas non plus guidée par la foi — seulement par une vision lucide de la vulnérabilité des personnes handicapées lorsque la mort est présentée comme une option de traitement.
En tant que fervent opposant au suicide assisté, j’étais très pessimiste lorsque le projet de loi de Leadbeater a remporté le scrutin des membres privés. Il y a eu de nombreuses propositions similaires au cours des 20 dernières années, et bien qu’elles aient toutes été finalement rejetées, certaines ont été des affaires très serrées. La tendance semble souvent être contre nous. Il est difficile de persuader les parlementaires de s’opposer à ce qui semble être des mesures compatissantes et libéralisantes, surtout lorsque des sondages d’opinion trompeurs sont utilisés pour revendiquer un énorme soutien public pour le suicide assisté. Bien sûr, ces sondages ne donnent généralement pas aux répondants suffisamment d’informations sur les propositions qu’on leur demande de soutenir.
Cependant, les choses pourraient s’améliorer. Même de nombreux libéraux sociaux — avec des opinions de gauche conventionnelles sur des questions telles que l’avortement, les droits des homosexuels et le laïcisme — sont mécontents de la suppression de l’interdiction légale pour les professionnels de la santé de mettre directement et intentionnellement fin à la vie de leurs patients. Avec une population vieillissante, un NHS en difficulté et un secteur des maisons de soins sous-financé, ils voient à juste titre le danger d’un tel mouvement. La situation épouvantable au Canada démontre sans aucun doute, à ceux qui ont les yeux pour le voir, que certaines pentes sont quelque peu savonneuses et qu’il est très difficile de maintenir des garanties appropriées.
Avec le leadership de Streeting et Mahmood, cela pourrait bien avoir un effet sur les députés travaillistes. Traditionnellement, les votes sur les « questions sociales » ne sont pas soumis à des consignes de vote, car ils sont considérés comme des questions de conscience individuelle. J’emets de fortes réserves sur cette convention, car elle permet aux gouvernements de faire passer des changements sociaux radicaux tout en évitant d’en rendre compte. Mais cela a peut-être des avantages. D’une part, cela peut réellement encourager les parlementaires à réfléchir à leurs propres opinions et à se poser des questions profondes, plutôt que de simplement s’en remettre à leur direction pour des réponses faciles.
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