Après des mois, voire des années, de spéculations sur ses ambitions politiques, Mark Carney a officiellement annoncé son intention de succéder à Justin Trudeau en tant que prochain leader du Parti libéral du Canada. S’il réussit, l’ancien gouverneur des banques centrales d’Angleterre et du Canada pourrait devenir premier ministre d’ici début mars. Il a lancé sa campagne dans sa ville natale d’Edmonton, capitale de l’Alberta, dans un geste destiné à transmettre un message d’unité nationale et de représentation pancanadienne au nom d’une marque libérale qui a historiquement eu du mal à remporter des sièges dans les provinces des prairies de l’Ouest.
Alternant entre l’anglais et un français passable et rouillé, Carney s’est présenté comme un outsider capable de sauver le parti au milieu d’une popularité en chute libre et de le rendre à nouveau compétitif face aux conservateurs montants de Pierre Poilievre. Se décrivant comme n’étant « pas le suspect habituel en matière de politique », il s’est vanté de son bilan de confrontations avec les populistes pro-Brexit au Royaume-Uni. Dans un effort pour rétablir les références centristes des libéraux, Carney a critiqué les idées d’extrême gauche, affirmant que « nous ne pouvons pas redistribuer ce que nous n’avons pas », une attaque apparente contre le bilan fiscal de Trudeau. Il a également appelé les électeurs à lui confier la tâche de faire face aux menaces tarifaires de Donald Trump.
Le récit de « l’outsider » peut être lu comme un contrepoint à Poilievre, qui est au parlement depuis la majeure partie de sa vie adulte. C’est aussi un défi plus immédiat à Chrystia Freeland, le seul rival sérieux de Carney pour la direction libérale, qui a été une ministre de cabinet éminente et une alliée de Trudeau, impopulaire, pendant la majeure partie de la dernière décennie avant de se retourner dramatiquement contre lui.
Cependant, les conservateurs ne laissent pas la revendication sans réponse, leurs canaux de médias sociaux semblant se surmultiplier ces derniers jours, produisant un contenu anti-Carney agressif. Les Tories aiment souligner que Carney a récemment été conseiller économique du gouvernement Trudeau, lui attribuant la taxe carbone du Premier ministre sortant — « Tout comme Justin » est un nouveau slogan — tout en notant son statut de membre perpétuel du cercle transatlantique de Davos. Les conservateurs ont même découvert des images de Carney s’adressant à un tel public et se référant à lui-même « comme un Européen », un faux pas embarrassant qui rappelle un autre leader libéral cosmopolite : Michael Ignatieff, qui a été célèbrement critiqué pour « juste en visite ».
Cependant, les partisans de Carney, si ce n’est le candidat lui-même, ont vu des signes d’espoir dans une apparition au Daily Show plus tôt cette semaine où il n’a affiché ni l’air de célébrité de Trudeau ni la tristesse académique d’Ignatieff. Au lieu de cela, comme même ceux des membres de la classe politique canadienne qui ne sont pas enclins à louer Carney l’ont reconnu, il est apparu affable et charmant. Tout en brandissant ses références en tant que chef de la politique monétaire du Canada lors de la crise financière de 2008, il a préfiguré une ligne d’attaque contre Poilievre, le décrivant comme celui qui « vénère le marché [mais] n’a jamais réellement travaillé dans le secteur privé ». Il est revenu sur ce thème lors de son discours à Edmonton hier, au cours duquel il a présenté le concours entre lui et le leader conservateur comme un affrontement entre « expérience contre incompétence, plan contre slogan, calme contre chaos ».
Mais le fait demeure que peu importe le talent politique ou l’incompétence que Carney finira par avoir, il a reçu une main incroyablement difficile par Trudeau sortant. Les Tories de Poilievre sont maintenant en territoire de super-majorité après avoir mené dans les sondages pendant plus de 18 mois. Et bien qu’un changement de leader aidera sûrement les libéraux à récupérer une partie de ce terrain perdu, il y a de fortes chances que cela ne soit pas suffisant.
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