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L’Ukraine devrait considérer l’offre de paix de Poutine

Peace or propaganda? Credit: Getty

juin 16, 2024 - 8:00am

Paix ou propagande? C’est la question qui surgit immédiatement après l’annonce inattendue  du président russe Vladimir Poutine qu’il serait prêt à ordonner un cessez-le feu immédiat si Kiev commençait à retirer ses troupes des quatre régions annexées par Moscou en 2022 et renonçait à rejoindre l’OTAN. 

Volodymyr Zelensky a déjà rejeté la proposition, la qualifiant de « complet faux-semblant ». Cependant, il pourrait y avoir d’autres opportunités dans le domaine de la diplomatie, motivées par l’évolution des conditions nationales et internationales. Tout d’abord, lors d’une récente réunion du G7, les nations réunies ont décidé d’accorder un prêt de 50 milliards de dollars à l’Ukraine, financé par des paiements d’intérêts sur les actifs russes gelés. Cela a été suivi par la signature d’un accord de sécurité bilatéral entre les États-Unis et l’Ukraine ainsi qu’une promesse de réprimer les pays qui aident Moscou à contourner les sanctions.  

Tout cela s’est produit avant le sommet de la paix pour l’Ukraine qui sera se tiendra en Suisse. Si la réunion du G7 doit donner le ton au sommet suisse, la Russie, qui a été exclue, doit s’attendre à ce que les 90 nations participantes se joignent au Canada, à la France, à l’Allemagne, à l’Italie, au Japon, au Royaume-Uni et aux États-Unis pour renforcer leur soutien à l’Ukraine. 

En même temps, cependant, Poutine sait aussi que les Européens sont fatigués de la guerre, et les partis politiques critiques du « soutien illimité » à l’Ukraine ont réalisé des gains significatifs lors des élections au Parlement européen le week-end dernier. En Allemagne, par exemple, l’AfD et l’Alliance Sarah Wagenknecht demandent ouvertement la fin de l’aide — une position similaire à celle adoptée par le Parti de la liberté autrichien et le Fidesz hongrois.  

Maintenir la désunion parmi les alliés occidentaux est un élément important de la boîte à outils diplomatique de la Russie, et cette proposition de cessez-le-feu pourrait être un moyen efficace d’y parvenir. Les partis politiques et les commentateurs pro-russes saisiront très probablement l’occasion de la proposition de Poutine, affirmant que Moscou voulait la paix depuis le début et que ce sont les Ukrainiens belliqueux et leurs soutiens occidentaux qui insistent pour continuer la guerre. 

Cela étant dit, maintenant que cette offre est d’actualité, l’Occident ne peut tout simplement pas simplement l’ignorer. Même si Poutine bluffe, il force également les Américains et les Européens à dévoiler leurs cartes : les deux parties doivent révéler quel est leur objectif final dans ce conflit et jusqu’où elles sont prêtes à aller pour le poursuivre. La position occidentale est-elle de soutenir la poursuite de la guerre jusqu’à ce que les frontières de 2014 soient rétablies — ou y a-t-il une certaine volonté à céder du territoire à la Russie ?  

Malgré l’aide financière et militaire qui continue d’affluer, il est désormais clair qu’aucune offensive ukrainienne ne suffira à reconquérir la totalité du territoire perdu. Pour ce faire, il faudrait disposer des systèmes d’armement les plus avancés de l’Occident et de la permission de frapper profondément et constamment le territoire russe. Bien que moralement justifiée, une telle démarche serait une escalade supplémentaire, et il n’y a tout simplement aucune garantie que si les villes russes sont bombardées, Poutine n’aurait pas recours à l’utilisation d’armes nucléaires tactiques, entraînant le monde au bord d’une guerre nucléaire. 

D’un autre côté, l’offre de paix de Moscou comporte certains avantages cachés. Même une Ukraine diminuée pourrait devenir une nation prospère avec l’aide de l’Occident, tout comme la Corée du Sud après 1953 ou l’Allemagne de l’Ouest après 1945. 

À ce stade, la proposition russe est encore trop vague, et l’on peut se demander s’il ne s’agit pas simplement de tenter d’obtenir un cessez-le-feu temporaire tout en se préparant à une future offensive. Mais il pourrait y avoir une certaine valeur à le mettre au défi. 


Ralph Schoellhammer is assistant professor of International Relations at Webster University, Vienna.

Raphfel

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