Le médecin général des États-Unis, Vivek Murthy, veut que les Américains croient qu’il n’existe pas de quantité sûre de consommation d’alcool. Son récent avis appelant à des étiquettes d’avertissement sur le cancer sur les bouteilles d’alcool suit un schéma familier dans la communication de la santé publique américaine : prendre un problème scientifique complexe, le réduire à ses éléments les plus effrayants et proposer des interventions lourdes qui vont bien au-delà de ce que les preuves suggèrent.
Le timing de Murthy est particulièrement intéressant. Sa proclamation dramatique est arrivée juste quelques semaines après que les Académies nationales des sciences ont publié un examen complet montrant que la consommation modérée d’alcool est en réalité associée à une mortalité toutes causes confondues inférieure à celle de l’absence totale de consommation d’alcool. Le décalage entre ces positions offre un aperçu de la manière dont les institutions de santé publique façonnent parfois les interprétations de la recherche pour justifier des interventions, tout comme lors des différentes phases de la réponse désorganisée et parfois maladroite à la Covid-19.
Le rapport des Académies nationales raconte une histoire plus nuancée que la condamnation générale de Murthy ne le suggère. Plus précisément, il a trouvé que la consommation modérée d’alcool est liée à une mortalité cardiovasculaire plus faible et à un risque réduit d’accidents cardiaques et d’accidents vasculaires cérébraux non fatals. Bien qu’ils aient identifié un certain risque accru de cancer du sein avec une consommation modérée, l’image globale est suffisamment complexe pour qu’elle ne justifie guère des étiquettes d’avertissement assimilant toute quantité d’alcool à un risque de cancer.
Peut-être plus révélateur, les gros buveurs — qui représentent seulement 7,2 % des consommateurs d’alcool — comptent pour environ 75 % des cancers liés à l’alcool. Les ratios de risque pour les buveurs légers sont minimes et souvent compensés par d’autres facteurs de style de vie. Pourtant, l’avis de Murthy ne fait aucune distinction entre quelqu’un qui apprécie un verre de vin occasionnel avec le dîner et quelqu’un qui boit beaucoup tous les jours.
Le timing de cette croisade soulève des questions sur les motivations institutionnelles. Le deuxième mandat non consécutif de Murthy (il a servi sous Obama et Biden) se termine le 20 janvier et sa position dramatique suggère des considérations politiques possibles. Les organismes de santé publique ont une tendance documentée à poursuivre des interventions de plus en plus agressives au fil du temps. Il suffit de regarder la campagne de plusieurs décennies du gouvernement contre l’industrie du tabac. Elle a commencé par des étiquettes d’avertissement avant de progresser vers des restrictions publicitaires, des taxes élevées et finalement des interdictions totales dans de nombreux espaces.
La méthodologie des Académies nationales souligne à quel point ces données de santé doivent être manipulées avec soin. Ils ont spécifiquement exclu les études qui combinaient les personnes n’ayant jamais bu avec d’anciens buveurs, pour éviter le « biais des abstinents » — le genre de distinction rigoureuse absente de la demande générale du médecin général. Ils se sont également concentrés sur des recherches de 2010 et au-delà, s’assurant que leurs conclusions reflètent la compréhension la plus actuelle plutôt que des hypothèses obsolètes.
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