L’invasion israélienne du sud du Liban, accompagnée d’une campagne de frappes aériennes principalement axée sur Beyrouth, a déjà déplacé 600 000 personnes à l’intérieur du pays, tout en provoquant la fuite de 300 000 autres. Parmi ce dernier groupe, environ 250 000 proviennent de la population de réfugiés syriens du Liban, qui compte entre 800 000 et 1,5 million, et ont maintenant retourné en Syrie.
Cependant, en instiguant une nouvelle crise des réfugiés, le conflit actuel souligne également l’évolution des attitudes de l’Europe envers les réfugiés issus du cycle de guerres au Moyen-Orient. Il y a quelques années, on s’attendait à ce que le flux de réfugiés se dirige vers l’Europe, soutenu par des acteurs régionaux. Lors de la crise de 2015, et plus agressivement lors de la confrontation frontalière de 2019 avec la Grèce, la Turquie a notamment utilisé les réfugiés et les migrants comme un outil de politique étrangère pour encourager l’intervention occidentale du côté des rebelles soutenus par la Turquie en Syrie. Mais cette dynamique a complètement changé.
Avec la victoire d’Assad désormais fermement établie, et les attitudes envers les réfugiés syriens en Turquie devenant de plus en plus hostiles, la Turquie s’est réinventée en tant qu’agent de contrôle des frontières efficace pour l’Europe. Financée de manière luxueuse par Bruxelles, elle déporte désormais sans pitié des Syriens vers les régions du nord de la Syrie qu’elle contrôle encore. En effet, le rapprochement d’Erdogan avec Assad, motivé en partie par le réalisme politique régional et en partie par le désir de résoudre les conséquences politiquement toxiques des attitudes initialement hospitalières de la Turquie envers les réfugiés syriens, fait écho à l’évolution de la position de l’Europe.
En juillet, huit pays de l’UE — l’Italie, la Grèce, l’Autriche, la Slovénie, la Slovaquie, la Croatie, la République tchèque et Chypre — ont appelé à un ‘réajustement’ des relations européennes avec Damas, visant explicitement ‘à réaliser les conditions pour des retours sûrs, volontaires et dignes des réfugiés syriens, conformément aux normes du HCR’. La question du retour des réfugiés syriens dans leur patrie dévastée, autrefois taboue dans le discours européen, devient de plus en plus courante. Le chancelier allemand Olaf Scholz s’est engagé en août à déporter des criminels syriens et afghans ainsi que des demandeurs d’asile déboutés, suite à une attaque au couteau terroriste à Solingen perpétrée par un demandeur d’asile syrien.
Ce même mois, Geert Wilders, leader du plus grand parti du parlement néerlandais, a promis de proposer une législation ‘pour que les Pays-Bas déclarent maintenant aussi la Syrie (partiellement) sûre et en principe ne plus accorder de permis de séjour aux Syriens et renvoyer les Syriens qui sont déjà aux Pays-Bas et n’ont pas encore de permis de séjour permanent’.
La question pour l’Europe est de savoir si, maintenant que la guerre est principalement terminée, la Syrie est légalement un pays sûr, ou, comme l’œuf du curé, seulement sûr par endroits. La décision de 2021 du Danemark selon laquelle la région plus large de Damas est désormais sûre a ouvert la voie aux déportations — bien que, comme Copenhague n’ait pas de relations diplomatiques avec le gouvernement d’Assad, cela a eu peu d’effet en pratique.
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