avril 8, 2025 - 3:10pm

Le principe d’Anna Karénine, popularisé pour la première fois par l’écrivain scientifique Jared Diamond dans son livre de 1997 Guns, Germs and Steel, tire son nom de la première ligne du roman de Tolstoï : « Toutes les familles heureuses se ressemblent ; chaque famille malheureuse l’est à sa manière. » Selon ce principe, il existe un chemin vers le succès mais de nombreuses façons d’échouer. Le succès nécessite une combinaison harmonieuse de facteurs, tandis que l’échec peut découler de nombreuses causes différentes.

C’est un problème que connaît bien le Parti conservateur, ayant trouvé de nombreuses façons d’échouer au cours de ses 14 années au pouvoir. Ayant longtemps promis une réduction de l’immigration et une augmentation de la construction de logements, ces promesses n’étaient guère plus que l’air qui les portait. Beaucoup espéraient que c’était un problème Tory, plutôt qu’un problème systémique. Keir Starmer a répété que la principale priorité de son gouvernement est la croissance. Mais une annonce du Parti travailliste cette semaine suggère que le parti est également malheureux, à sa manière.

Le gouvernement a révélé qu’il prévoit de renforcer les lois sur l’égalité en établissant une unité de régulation et d’application de l’égalité salariale pour mettre fin à la discrimination salariale à l’encontre des minorités ethniques et des personnes handicapées. Dirigé par la ministre de l’Égalité Seema Malhotra, cet organisme travaillerait avec les syndicats pour améliorer l’application des droits à l’égalité salariale et fournir un soutien accru aux travailleurs qui déposent des plaintes.

Les militants ont soutenu que les protections existantes en vertu de la loi sur l’égalité de 2010 n’ont pas réussi à réduire de manière significative les écarts de salaire, en particulier dans les emplois peu rémunérés et externalisés, et qu’une application plus stricte est nécessaire. Malhotra a présenté les réformes comme faisant partie d’un « plan de changement » plus large, arguant que « l’égalité est un facteur clé pour garantir une croissance à long terme et durable de l’économie britannique. »

Pour un gouvernement obsédé par la croissance, l’égalité salariale imposée par l’État semble être un évident décalage. Mais la vérité — comme l’électorat l’a finalement compris avec les Tories — est que les préférences déclarées comptent souvent peu. Pour tout le discours de Starmer sur la croissance, le Parti travailliste a systématiquement échoué à mettre en œuvre des mesures de croissance. De même, ce nouveau quango, qui est simplement un moyen de faire avancer l’objectif d’égalité sans coût pour le gouvernement, qu’il soit fiscal ou politique.

Créer un nouveau quango est le bloc de construction essentiel de la stratégie de gouvernance starmerite, permettant aux ministres de faire avancer leurs objectifs idéologiques par un contrôle à distance, tout en créant l’illusion que la politique est faite par des experts, les isolant de toute réaction négative.

Mais cet organisme permet également au gouvernement de poursuivre l’objectif ultime de la politique de gauche — l’égalité — sans supporter de coûts fiscaux lui-même. Dans cette illusion se cache le véritable génie du Parti travailliste : avec des finances aussi serrées qu’elles le sont, le gouvernement externalise l’égalité au secteur privé, lui permettant de revendiquer la victoire sur des questions progressistes sans avoir à affronter les réalités gênantes de la responsabilité fiscale directe. Les entreprises sont donc contraintes de servir des objectifs de gauche, tandis que le Parti travailliste évite les retombées politiques et économiques d’une intervention directe. Starmer pourra alors obscurcir les coûts pour l’économie au sens large en blâmant les gouvernements précédents.

Mais aussi astucieux que soit ce stratagème, le principe d’Anna Karénine s’applique toujours : l’échec peut découler de nombreuses causes différentes. Sans un véritable plan pour garantir la croissance, le gouvernement stagnera sur ses propres objectifs déclarés. À mesure que la frustration à l’égard de la politique augmente, il se peut qu’il ne faille pas 14 ans au Parti travailliste pour subir la même conséquence que les Tories.