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Justin Trudeau a perdu la gauche canadienne

Justin Trudeau, le premier ministre du Canada, s'exprime lors d'une retraite ministérielle à Montréal, Québec, Canada, le mardi 23 janvier 2024. Trudeau prépare ce qu'il appelle une approche 'Équipe Canada' pour interagir avec les États-Unis alors que le pays se prépare à un possible retour du président Donald Trump. Photographe : Allen McInnis/Bloomberg via Getty Images

septembre 8, 2024 - 1:00pm

La politique canadienne a été plongée dans une incertitude supplémentaire cette semaine. Jagmeet Singh, leader du Parti démocratique nouveau (PDN) de gauche, a annoncé qu’il mettait fin à l’accord de soutien et de confiance qui a soutenu le gouvernement minoritaire libéral de Justin Trudeau depuis mars 2022, ajoutant que le parti au pouvoir est ‘trop faible’ et ‘trop égoïste’ pour défendre les Canadiens ordinaires.

Cette décision fait suite à la pression du leader conservateur Pierre Poilievre, qui a appelé Singh à rompre avec le Premier ministre et à déclencher des élections. Cependant, le PDN s’est arrêté avant de demander un vote de confiance qui pourrait potentiellement renverser le gouvernement. Cette ambiguïté de la part de Singh laisse ouverte la possibilité que les libéraux de Trudeau puissent subsister en négociant un soutien législatif au cas par cas.

Poilievre a qualifié le coup de Singh de simple ‘stunt’ qui pourrait ne pas réellement modifier l’équilibre des pouvoirs. L’accord Trudeau-Singh a produit un certain nombre de réformes à la demande du PDN, y compris l’élargissement des soins dentaires et des options de pharmacare, mais ces politiques n’ont pas réussi à faire bouger les choses pour l’un ou l’autre des partis, les libéraux et les néo-démocrates ayant tous deux du mal dans les sondages depuis des mois.

Les mêmes tendances de sondage indiquent une imminente débâcle électorale pour les deux partis progressistes du Canada, les Tories de Poilievre étant prêts à être les bénéficiaires de toute élection anticipée. Le leader conservateur a cherché à profiter d’une bataille électorale centrée sur la taxe carbone impopulaire de Trudeau, qu’il a liée à la crise du coût de la vie dans le pays.

Les sondages montrent que les conservateurs gagnent du terrain dans presque toutes les régions et démographies, amenant certains analystes à se demander ce que Singh pourrait bien gagner d’une campagne d’automne. Le PDN, actuellement en troisième position dans les sondages, pourrait chercher à établir une distance entre lui et le Premier ministre avant de pouvoir lever des fonds et établir un nouveau récit politique. Singh pourrait essayer de reprendre le rôle traditionnel du parti en tant que porte-drapeau de la classe ouvrière contre les forces de l’establishment commercial, auquel les libéraux et les conservateurs ont tous deux été partiaux.

En effet, une source de tension entre les deux partis ces dernières semaines a été les positions opposées sur les questions des syndicats. Un exemple est une récente grève ferroviaire que les néo-démocrates ont fortement soutenue contre le nouveau ministre du Travail de Trudeau, Steven MacKinnon, qui a émis un arbitrage contraignant au conseil des relations industrielles comme moyen de mettre fin à l’action de grève. Singh a qualifié cette décision de ‘lâche, anti-travail et preuve qu’ils céderont toujours à la cupidité des entreprises’.

Une autre grève imminente de la compagnie aérienne nationale Air Canada menace de créer encore un autre fossé entre les néo-démocrates et le gouvernement libéral. Pendant ce temps, Poilievre a cherché à tirer profit de la division à gauche en vendant son propre message pro-travailleur ; bien que les conservateurs soient restés largement silencieux sur la récente grève, ils ont essayé de pivoter sur des questions telles que ‘la législation anti-sabotage’, qu’ils ont récemment soutenue. Comme lors des élections américaines, il semble que le vote de la classe ouvrière sera déterminant pour décider du prochain gouvernement canadien.

Au niveau fédéral, le Canada n’a connu que des gouvernements libéraux et conservateurs, le PDN servant de troisième parti traditionnel (bien qu’avec 24 sièges, il soit techniquement maintenant le quatrième parti après le Bloc québécois séparatiste avec 32). Le parti a souvent joué le rôle de faiseur de rois, bien qu’il sera extrêmement difficile de reprendre ce rôle étant donné que sa cohabitation avec les libéraux a dégoûté des millions de Canadiens de la perspective d’une gouvernance progressiste continue. Plutôt que de réinitialiser le récit, l’action de Singh pourrait simplement avoir accéléré un résultat politique qui se prépare depuis des années : la droite accédant au pouvoir à Ottawa et la gauche se ruinant.


Michael Cuenco is a writer on policy and politics. He is Associate Editor at American Affairs.
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