Il n’est pas rare qu’un homme politique battu, en train de vider son bureau, laisse un cadeau de départ désagréable à son successeur. Dans le cas de Joe Biden, The Wall Street Journal a accusé cette semaine le président sortant d’avoir transmis un « désordre ukrainien » à Donald Trump. L’une des erreurs ayant conduit à un tel fiasco serait, selon le WSJ, la limitation par Biden de l’approvisionnement en aide militaire américaine, ce qui a affaibli la capacité de Kyiv à passer à l’offensive contre les forces russes et a préparé le terrain pour un « statu quo sanglant ».
Mais Biden n’a pas fini de peaufiner ce « cadeau ». Inquiet que le président élu Trump puisse interrompre les livraisons d’armements à l’Ukraine, le secrétaire d’État Antony Blinken a promis hier de « renforcer tout ce que nous faisons pour l’Ukraine » afin qu’elle puisse soit se battre efficacement jusqu’en 2025, soit négocier d’une position de force. Cela impliquera d’accélérer les 6 milliards de dollars restants en aide militaire à Kyiv, tandis que les exigences de la situation et le désir de Biden de préserver son héritage l’emporteront probablement sur sa réticence passée à autoriser l’Ukraine à tirer des missiles à longue portée sur la Russie. Ces deux mesures sont positives pour l’Ukraine, mais elles garantiront aussi que le Kremlin soit occupé par un Vladimir Poutine furieux juste au moment où Trump reprendrait ses fonctions à la Maison Blanche.
Le conflit lui-même pourrait devenir plus chaotique avant l’inauguration de Trump, alors que la Russie — soutenue par des troupes nord-coréennes — se précipite pour prendre les zones ukrainiennes à Kursk, dans le but de priver Kyiv de cette carte de négociation stratégique avant que le nouveau président n’essaie de lancer des pourparlers. Les récents barrages de drones témoignent de l’intensification des tensions des deux côtés après l’élection, alors que Kyiv cherche à obtenir autant de victoires que possible avant de potentiellement perdre une aide vitale en provenance des États-Unis.
Dans ce contexte, l’homme qui a promis de mettre fin à la guerre en un jour — et qui se vante d’être le meilleur négociateur — porte le poids du monde, ou du moins une partie significative de celui-ci, sur ses épaules. Que devrait faire Trump ? Un accord équitable nécessiterait d’abord de persuader Moscou de venir à la table des négociations. Mais le problème, c’est que, alors que la Russie progresse sur le champ de bataille dans le Donetsk, elle n’a que peu d’incitations à faire des compromis.
Une option pour le président élu serait de menacer d’augmenter l’aide militaire à l’Ukraine et de lever les restrictions sur son utilisation. Pourtant, cela impliquerait d’aliéner une partie importante de sa base MAGA. Cela signifierait aussi devoir gérer des législateurs républicains de plus en plus fatigués par le soutien à l’Ukraine, à l’image du président de la Chambre des représentants, qui se plaignant le mois dernier qu’il n’a pas « d’appétit pour un financement supplémentaire pour l’Ukraine » et espère que Trump « mettra fin à ce conflit ».
Ajoutant aux soucis de Trump, il y a la spéculation constante sur ses liens avec la Russie, q spéculation que Moscou peut raviver à tout moment pour le faire trébucher. Il suffit de regarder l’attention médiatique suscitée par l’affirmation de Nikolai Patrushev, l’assistant présidentiel russe, selon laquelle « pour réussir aux élections, Donald Trump s’est appuyé sur certaines forces » envers lesquelles il serait désormais « obligé de remplir […] des obligations correspondantes ».
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