X Close

L’effondrement de Syriza est un présage pour la gauche européenne

Ancien leader du principal parti d'opposition de Grèce, Syriza, Stefanos Kasselakis (C) salue des partisans, avant une annonce pour une nouvelle formation politique, à Athènes le 9 novembre 2024. Stefanos Kasselakis a lancé un nouveau mouvement « populaire progressiste » qu'il a déclaré financièrement indépendant, comblant un vide majeur dans la politique du pays. (Photo par Angelos TZORTZINIS / AFP) (Photo par ANGELOS TZORTZINIS/AFP via Getty Images)

novembre 11, 2024 - 10:00am

Le 25 janvier 2015, un charismatique homme de gauche nommé Alexis Tsipras a conduit son parti à la victoire lors des élections générales grecques. Ce fut un moment galvanisant, non seulement en Grèce, mais pour la gauche à travers l’Europe. Pour la première fois depuis des décennies, l’un des leurs — un anti-capitaliste convaincu — avait gagné aux urnes et allait former un nouveau gouvernement. L’analyse d’Owen Jones était intitulée : « voici à quoi ressemble la politique de l’espoir. »

Un instant, on pouvait sentir les fondations du néolibéralisme trembler. Mais aujourd’hui, c’est le parti de Tsipras, Syriza, qui est en ruines. Ayant perdu le pouvoir en 2019, Syriza est en chute libre depuis. Politico a rapporté ce week-end le dernier désastre pour le mouvement — une scission dommageable et possiblement terminale.

Tsipras a démissionné de son poste de leader l’année dernière, remplacé par Stefanos Kasselakis, un ancien trader de Goldman Sachs qui s’est avéré être un choix prévisible et maladroit. Chassé par une motion de censure cette année, Kasselakis a ensuite été interdit de se présenter à de nouvelles élections de leadership. En réponse, il a formé son propre parti, emmenant avec lui plusieurs membres du parlement de Syriza.

Grâce à cette dernière scission, Syriza pourrait maintenant perdre son statut de plus grand parti d’opposition. Et pour comble, cela serait perdu au profit de Pasok-Kinal — un descendant de l’ancien parti centriste dominant que Syriza avait précédemment conduit au bord de l’extinction. En effet, le triomphe de Syriza sur son rival était si complet que le mot «Pasokification» a été inventé pour décrire le déclin des partis sociaux-démocrates à travers l’Europe. Mais maintenant, en Grèce, ce processus est en train de se défaire — pour l’humiliation de Syriza.

Alors, où tout a-t-il mal tourné ? La réponse, bien sûr, est Bruxelles — ou, pour être plus précis, Francfort, où se trouve le siège de la Banque centrale européenne (BCE).

Syriza est arrivé au pouvoir à la suite de la crise de la zone euro. Dans une tentative de sauver la monnaie unique, la BCE a imposé une austérité extrême aux pays membres les plus endettés, en particulier la Grèce. Tsipras a été élu sur une vague de colère populaire — un résultat qui a été souligné par le référendum de 2015, au cours duquel les électeurs grecs ont massivement rejeté les conditions draconiennes attachées au plan de sauvetage proposé par l’UE.

C’était un cas de pouvoir populaire contre les banquiers centraux — mais les banquiers ont gagné. Tsipras a été contraint d’accepter un accord encore plus sévère que celui rejeté lors du référendum. Il a fallu un certain temps pour que les conséquences complètes se fassent sentir, mais à partir de ce moment, Syriza était condamnée.

Pour les conservateurs, c’était une tragédie — l’issue inévitable d’un endettement excessif et de la reddition de sa monnaie nationale aux étrangers. Mais pour la gauche, cela aurait dû être un moment révolutionnaire — une occasion de mettre les gens avant le profit, la classe ouvrière avant le capital.

Pourquoi les partis de gauche et les syndicats d’Europe ne se sont-ils pas mobilisés en soutien à Syriza et au peuple grec ? Où étaient les manifestations de masse et les grèves générales ? En dehors de la Grèce, nulle part. C’était un moment de vulnérabilité réelle pour l’ordre néolibéral — ou du moins cette partie de celui-ci contenue dans les institutions de l’Union européenne — mais les activistes sont restés les bras croisés.

Aujourd’hui, la gauche européenne est fragmentée. Certains partis progressistes, en particulier les divers partis verts, sont encore contents de travailler dans le cadre de l’Union européenne malgré la force croissante de leurs ennemis à droite populiste. Avec les barrières à l’immigration qui se dressent à travers le continent, il va devenir de plus en plus difficile pour les gauchistes pro-UE d’expliquer d’où viendra le progrès qu’ils recherchent.

D’autres parties plus eurosceptiques de la gauche, comme LFI de Jean-Luc Mélenchon en France et les Corbynistes survivants en Grande-Bretagne, se concentrent sur des causes de politique étrangère privilégiées comme la Palestine et la construction d’une base de pouvoir parmi les communautés ethniques minoritaires à domicile. Une tendance de plus en plus dissidente de la gauche se développe dans une direction populiste, avec le parti de Sahra Wagenknecht en Allemagne comme exemple principal, aux côtés de mouvements similaires comme Course of Freedom en Grèce.

Si cela semble être un désordre incohérent, c’est parce que c’en est un. La gauche a toujours été la plus efficace lorsqu’elle a une grande cause pour l’unifier. Une lutte totale contre le régime d’austérité imposé à la Grèce aurait pu être la lutte d’une génération, mais au lieu de solidarité quand cela comptait vraiment, Syriza et le peuple grec ont été laissés à leur sort.


Peter Franklin is Associate Editor of UnHerd. He was previously a policy advisor and speechwriter on environmental and social issues.

peterfranklin_

Participez à la discussion


Rejoignez des lecteurs partageant les mêmes idées qui soutiennent notre journalisme en devenant un abonné payant


To join the discussion in the comments, become a paid subscriber.

Join like minded readers that support our journalism, read unlimited articles and enjoy other subscriber-only benefits.

Subscribe
S’abonner
Notification pour
guest

0 Comments
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires