Malgré la grande vision de Thierry Breton pour l’UE en tant qu’empire réglementaire capable de contrôler la Silicon Valley, ses réalisations réelles racontent une histoire différente. En fait, beaucoup des récentes actions (entièrement symboliques) de Breton contre Elon Musk — dont la Commission européenne s’est distancée — sont largement motivées par des raisons politiques.
Breton n’a pas caché le fait que son ambition est de diriger la Commission européenne, ce qui l’a mis sur une trajectoire de collision avec Ursula Von der Leyen. En effet, son opposition au candidat de cette dernière pour le poste supervisant la politique des petites et moyennes entreprises était si véhémente que le candidat lui-même a démissionné, prétendant dans une interview que le boycott de Breton ne lui permettrait pas d’exercer correctement ses fonctions.
Ailleurs, Breton a essayé de revendiquer des mérites là où il n’y en a pas. Par exemple, le Commissaire européen au Marché intérieur et aux Services affirme qu’avec Macron et Charles Michel, il a construit l’autonomie stratégique européenne. Il se vante d’imposer des sanctions unanimes contre la Russie, bien que leur efficacité semble douteuse compte tenu de la résilience économique du régime de Poutine. Il met également en avant les efforts de réindustrialisation, mais comme l’a noté un analyste pro-UE : « L’UE manque de la capacité analytique et de la volonté politique pour formuler des priorités de politique industrielle significatives ; elle ne dispose pas des outils réglementaires pour soutenir les industries sélectionnées ; et elle manque du pouvoir financier pour tirer parti de l’échelle du marché européen et atteindre ses objectifs sans compromettre la concurrence loyale. »
L’indépendance énergétique est un autre domaine où le succès reste largement fictif. À travers le continent, il n’y a pratiquement aucune coordination. Prenons par exemple le bouclier énergétique de l’Allemagne protégeant les entreprises nationales des coûts élevés, qui a suscité des manifestations en France, ou la résistance de Berlin à l’énergie nucléaire. De plus, l’essor des énergies renouvelables dépend fortement des chaînes d’approvisionnement chinoises.
Dans le domaine de la défense, où Breton affirme que l’autonomie stratégique devrait se manifester pleinement, le principe de ‘préférence européenne’ semble inexistant : les États membres continuent d’acheter des armes aux Américains, Israéliens ou Sud-Coréens. Les projets de défense conjoints, tels que le char européen ou le chasseur, peinent à décoller, avec des pertes qui ne font qu’augmenter. Le Fonds européen de défense, présenté comme une réalisation significative pour soutenir l’Ukraine, ne signifie guère plus que de la ‘comptabilité créative’ — un reconditionnement des contributions existantes.
De plus, le capital politique de Breton est encore érodé par la situation désastreuse de l’entreprise qu’il a autrefois dirigée en tant que PDG. Atos, une entreprise informatique qui fournit entre autres des logiciels critiques pour la dissuasion nucléaire française, est dans un état déplorable et est sur le point d’être vendue à un milliardaire tchèque. Selon les médias français, des acquisitions mal pensées et un manque de vision de la part de Breton — il n’aurait apparemment pas cru que la technologie cloud avait un avenir — ont contribué à la chute de l’entreprise.
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